Métiers au féminin : les traditions perdurent mais évoluent

N’en déplaise à la gent masculine, certaines professions demeurent l’apanage des femmes, notamment celles liées à la maternité et à la petite enfance. Même si les mentalités évoluent et que certains hommes tentent de s’y faire une place, les femmes y sont plus largement représentées. Pour l’heure, Couleur Lauragais s’est livré à un inventaire de ces secteurs où la femme active est plus largement représentée, sans oublier ceux où elle fait figure d’exception.

Les métiers les plus féminisés en chiffres

Grâce à une étude datant de 2013 (1), on apprend que les 10 métiers dans lesquels les femmes sont très largement représentées sont :

  • les services à domicile – aides à domicile, aides ménagères assistants maternels (97,7%)
  • les secrétaires (97,6%)
  • les employés de maison (94,3%)
  • les aides-soignants (90,4%)
  • les infirmiers et sages-femmes (87,7%)
  • les employés de comptabilité (84,6%)
  • les employés administratifs d’entreprise (76,9%)
  • les vendeurs (73,5%)
  • les employés administratifs de la fonction publique (73,4%)
  • les agents d’entretien (70,5%)
  • les enseignants (65,7%)

Les métiers de la santé

D’une manière générale, la fonction publique hospitalière est largement féminine et compte près de 80% de femmes. Pour autant, les femmes ne sont pas majoritaires partout, c’est-à-dire qu’elles sont surtout plus nombreuses à des postes d’administratifs et de soignants. Si l’on dénombre les infirmières libérales et celles exerçant dans le public, on compte encore 87% de femmes. Pour accéder à ces fonctions, les candidats sont désormais sélectionnés sur dossier et intègrent un Institut de formation en soins infirmier durant 3 ans ponctués par de nombreux stages en milieu hospitalier afin d’obtenir un Diplôme d’Etat. Par la suite, les carrières divergent selon que le métier est exercé au sein de l’hôpital ou en libéral. En milieu hospitalier, l’infirmier(e) fait partie d’une équipe médicale au sein de laquelle il/elle prodigue des soins et participe à l’élaboration des diagnostics. C’est l’infirmier(e) qui supervise plus spécifiquement certains contrôles tels que les prélèvements sanguins, la prise de tension et de température, le renouvellement de pansements, la préparation et l’administration des médicaments… Par ailleurs, l’infirmier s’acquitte également de fonctions plus administratives en assurant le suivi des dossiers médicaux. En libéral, l’infirmier travaille à son compte et administre des soins au domicile des patients. Cette profession requiert une résistance physique et psychologique afin de faire face aux nombreuses heures de garde, souvent en horaires décalés mais également à des situations requérant beaucoup d’écoute et d’accompagnement des malades comme de leur entourage. La surreprésentation des femmes s’expliquerait par des éléments d’ordre sociologique. D’abord, on considère que dans l’éducation la pression subie par les femmes concernant leur niveau d’étude serait moins importante que celle subie par les hommes. Ensuite, par tradition, l’image de certains métiers comme celui d’infirmier(e) est très « sexuée », ce qui est le cas plus largement concernant les métiers du secteur des services et des soins à la personne. Dans leur choix professionnel, les femmes accorderaient aussi plus d’importance que les hommes à la relation humaine plutôt qu’au pouvoir. Enfin, l’aspiration des femmes à fonder un foyer influencerait également leur choix de carrière en les détournant de certaines professions moins compatibles avec une vie de famille. Ces éléments d’explication sont cependant à prendre avec des pincettes car on constate, de plus en plus souvent, une porosité entre les métiers traditionnellement réservés aux femmes et ceux qualifiés de « masculins ». Il existe en la matière un exemple probant, celui du métier de sage-femme. Dans une profession largement dominée par les femmes, certains hommes font en effet le choix de devenir sage-femme. Cette évolution est assez récente car la profession ne s’est ouverte aux hommes qu’en 1982. Si le terme de sage-homme n’existe toujours pas dans le dictionnaire, ils sont pourtant 2,6% en France à accompagner chaque jour la grossesse des futures mamans et leurs nourrissons dès la naissance. Sophie, qui a fait le choix d’être accompagné par un sage-homme durant sa troisième grossesse, revient sur cette expérience.

« J’ai été accompagnée par un sage-femme » – Sophie, 39 ans, 3 enfants

« Lorsque j’ai contacté ma PMI (Protection Maternelle et Infantile) durant ma troisième grossesse, c’est avec un homme sage-femme que j’ai été mise en relation. Au début, cela m’a laissé perplexe car j’ai imaginé les différents stades de ma grossesse et me suis posée la question de savoir si j’aurai la même liberté de parole à l’égard d’un homme. La sage-femme ayant eu souvent elle-même des enfants et « ressenti » la grossesse et l’accouchement dans sa chair, je me demandais comment cette différence pouvait se traduire en pratique. Il se trouve que lors de nos rendez-vous de préparation à l’accouchement et des visites post-natale, je n’ai jamais trouvé de manque à cet égard. Sa précision, la qualité des conseils qu’il me donnait et sa grande qualité d’écoute ont rapidement balayé mes interrogations. Suite à l’accouchement, je n’ai pas hésité à le solliciter pour les petits bobos du post-partum et il a également été de très bons conseils dans le cadre de la mise en route de l’allaitement. Par la suite, lorsque nous avons été confrontés à une situation d’urgence à l’occasion d’une visite post-natale, il a été très réactif et a fait preuve de beaucoup de sang-froid. Ce professionnel a été très présent à la suite, soucieux de l’état de santé de mon enfant mais également de la façon dont j’avais vécu cet événement et dont je vivais les inquiétudes qui ont été les nôtres pendant quelques semaines seulement. J’aurais certainement trouvé la même qualité d’accompagnement auprès d’une sage-femme. Cette expérience m’a tout de même permis de confirmer que, dans ce métier, les hommes autant que les femmes sont animés d’une véritable vocation. »

Les métiers de la petite enfance et de l’éducation

Au nombre des métiers largement féminins, on compte également ceux de la garde et de l’éducation des jeunes enfants. Les femmes représentent par exemple près de 98% des assistantes maternelles à domicile ou en structure. Les assistants maternels bénéficiant de l’agrément des conseils généraux ne représentent que 0,5% de la profession. Dans ce domaine, les traditions sont plus ancrées et moins susceptibles d’évoluer, d’ailleurs ces chiffres n’ont pas changé depuis les années 90. Les familles ayant des besoins de garde se tournent naturellement vers les femmes car elles ont eu elles-mêmes des enfants et seraient donc plus qualifiées pour assurer la garde des tout-petits. Pour autant, d’autres freins sociologiques et psychologiques perdurent et les préjugés à l’encontre d’hommes au contact des enfants ont la dent dure. La réticence des autorités, notamment des PMI à l’égard des hommes souhaitant exercer ces métiers est réelle mais demeure masquée. Dans le secteur de l’éducation désormais, les femmes sont de nos jours majoritaires, ce n’était pourtant pas le cas il y a 50 ans. A cette époque l’enseignement primaire comptait 54% de femmes et 46% d’hommes, soit une situation de quasi parité ! Aujourd’hui les enseignantes représentent 82% du corps enseignant. Dans l’enseignement du second degré, la proportion est moindre mais les femmes représentent tout de même plus de 60% des enseignants, alors qu’elles ne sont plus que 37% dans l’enseignement supérieur. En revanche, plus on monte dans la hiérarchie, moins elles sont nombreuses.

Les métiers de la beauté

Loin de nous l’idée de faire la part belle aux clichés mais il faut bien reconnaître que la plupart des métiers liés à la beauté demeurent largement féminins. C’est le cas des esthéticiennes et des gérantes d’institut de beauté. Pour autant les exceptions existent, notamment sous l’influence de la multiplication des soins masculins. Seul le métier de coiffeur se teinte d’un peu de mixité, cependant 8 coiffeurs sur 10 sont encore des coiffeuses !

Les métiers les moins féminisés en chiffres

En 2013, le même organisme (DARES) a publié dans le même temps, les métiers dans lesquels les femmes sont les moins représentés. On compte parmi eux :

  • les ouvriers qualifiés du gros œuvre du bâtiment (2,1%)
  • les ouvriers qualifiés du second œuvre du bâtiment (2,1%)
  • les techniciens et agents de maîtrise du bâtiment et des travaux publics (7,9%)
  • les techniciens et agents de maîtrise de la maintenance (8,9%)
  • les conducteurs de véhicules (10,5%)
  • l’armée / la police / les pompiers (14,8%)
  • les ouvriers qualifiés de la manutention (15,8%)
  • les ingénieurs de l’informatique (20,3%)
  • les agriculteurs / éleveurs / sylviculteurs / bûcherons (27,1%)

Ces études ont l’intérêt de démontrer que les métiers qualifiés de « mixtes » sont encore peu nombreux aujourd’hui. Il en existerait près de 20 regroupant environ 20% de la population active. Les secteurs concernés sont les professions juridiques, les arts et spectacles, la communication et l’information, ou encore les industries de process agroalimentaire.

Femmes à contre-emploi ?

Ce n’est pas parce qu’elles sont peu représentées dans de nombreux métiers que les femmes se voient interdire l’accès à certaines carrières. Elles sont par exemple de plus en plus nombreuses dans les métiers de la sécurité. Dans la Police Nationale par exemple, leur effectif a augmenté de 30% en 10 ans. Chez les CRS alors qu’il n’y avait pas encore de femme au début des années 2010, elles représentaient plus de 8% des effectifs en 2014. Le site du Ministère de la Défense se targue quant à lui d’avoir l’armée la plus féminisée au monde. Les femmes représentent en effet 15,5% des militaires et 14,5% des officiers. Depuis une dizaine d’années, certains secteurs se féminisent plus que d’autres, c’est notamment le cas de la viticulture qui compte 31% de femmes. Dans l’agriculture également, les femmes représentent 32% des actifs agricoles et un quart des chefs d’exploitation. Cette féminisation apporte son lot de conséquences positives sur ces secteurs en pleine mutation et sont synonymes de modernisation.

Ces mutations interrogent également plus largement la sphère privée puisque l’accès à certaines carrières est aussi fonction d’un partage des tâches nécessairement plus équitable au sein du foyer. C’est également au prix de cette évolution que les termes de « métiers d’hommes » et de « métiers de femmes » disparaîtront peut-être un jour de notre vocabulaire.

(1) Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES), 13 décembre 2013

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