Castelnaudary, capitale de l’emblématique Cassoulet, est chargée d’histoire : elle renferme de nombreux trésors dans son cœur de ville, la halle de Verdun, l’ancien couvent des Carmes, le moulin de Cugarel… Attrait touristique, son port et son immense plan d’eau, Le Grand Bassin. D’intérêt patrimonial unique, celui-ci a été récemment aménagé de pontons flottants en bois permettant d’en faire un tour complet. Privilège des promeneurs et autres amateurs de belles photos, il offre un admirable panorama de la vieille ville et de la collégiale Saint-Michel se reflétant dans ses eaux.
En allant plus au nord, nous nous arrêterons à Saint Papoul pour découvrir sa célèbre Abbaye et ses anciens moulins.
Les moulins de Saint-Papoul
De nombreux moulins à vent ont fonctionné dans ce village. En 1836, on pouvait en compter huit. Malheureusement, la plupart d’entre eux ont disparu et ne subsistent plus désormais que les restes de trois tours plus ou moins démantelées.
Le moulin rouge
Le mieux conservé et le plus intéressant de tous porte le nom de moulin rouge car celui-ci était recouvert, au temps de son activité, d’un toit de tuiles rouges. A ma connaissance, cette particularité ne se retrouve pas ailleurs en Lauragais. Assurément, nous avons là le moulin le plus isolé que j’ai pu rencontrer au cours de toutes mes recherches. En effet, depuis Les-Ferrals, à condition de ne pas s’égarer, près d’une demi-heure de marche à pied à travers une magnifique forêt de résineux, est nécessaire pour y parvenir. Ayant appartenu à la famille de Roquelaure, ce moulin à vent postérieur à 1836, n’est pas très ancien. Son fût décoiffé mais encore en bon état, se dresse fièrement au milieu d’une petite clairière à la limite de la commune. Percée de deux portes opposées, sa vaste tour a contenu deux paires de meules, dont une se trouve encore en place sur son socle au rez-de-chaussée.
Le moulin de l’Ange ou du Vernis
À proximité du village et de la route conduisant à Villemagne, se dresse le corps d’un moulin à vent en partie arasé et couvert d’un toit de tuiles à deux pentes. Tout d’abord et jusqu’aux environs de 1840, il servait à confectionner de la farine, avant d’être utilisé au broyage du plomb. À ce sujet, en pénétrant à l’intérieur, on distingue sur les parois des murs, de grandes traces de couleur brun-orangé et vert-bleu incrustées dans l’enduit mural : « en aucun cas de telles tâches, n’auraient pu provenir d’un moulin à blé » d’après M. JP. Flores. Son arrêt est intervenu vers la fin du XIXème siècle.
Le moulin de l’Espinelle
De ce dernier, aujourd’hui employé pour les besoins d’une ferme, seule subsiste une partie de la tour couverte d’un toit de tuiles à une pente. Réduit à l’inactivité depuis bien longtemps, ce moulin utilisé par la suite pour la confection du pain, est encore pourvu intérieurement de la cheminée d’évacuation des fumées. Construit en pierre, le four accolé au fût sur le côté extérieur gauche de la porte d’entrée est toujours présent. Comme le moulin rouge, celui de l’Espinelle a appartenu à la famille de Roquelaure, châtelain des Ferrals, et a par la suite changé de mains à plusieurs reprises.
Le moulin de la route de Villespy
Toujours à Saint-Papoul, un autre moulin à vent construit en 1803 a également fonctionné. Ce magnifique spécimen possédait des ailes de 16,30 mètres, et était conduit par le meunier Eloi Durand. Arrêté un peu avant la Deuxième Guerre Mondiale, il fut totalement démoli en 1970, alors qu’il était en ruines depuis son écroulement survenu dans la nuit du 29 au 30 septembre 1946. Il est particulièrement intéressant de remarquer que le peintre Paul Sibra l’avait reproduit dans un dessin en août 1946, ne se doutant pas à ce moment-là, qu’il fixait ses derniers instants. Il nous reste du temps de sa splendeur passée, deux cartes postales datant de la Guerre de 1914-1918, dont une le représente en gros plan. Sur ce document, on peut apercevoir des soldats en convalescence devant le moulin. Le village de Saint-Papoul avait accueilli des blessés d’un régiment du nord, l’ancien palais épiscopal étant transformé en hôpital militaire.
L’abbaye de Saint Papoul
À 8 km au Nord de Castelnaudary, dans une région boisée, au contact des collines et de la Montagne Noire, se dresse l’abbaye de Saint Papoul, abbaye très ancienne dont la fondation remonte au VIIIème siècle. Son église est l’ancienne cathédrale de l’évêché du Lauragais, créé en 1317 par le pape d’Avignon Jean XXII.
Le cloître de l’Abbaye de Saint Papoul
Au Moyen Age, pendant la croisade (1209-1229), ce monastère ne joue qu’un rôle très modeste. Il prend par contre une certaine importance sous Charlemagne et Louis le Pieux et accueillera dans son cloître, la dépouille mortelle d’un grand seigneur cathare, Jourdain de Roquefort (vers 1233). 1317 est une date importante puisque Saint Papoul devient le siège de l’évêché du Lauragais. L’église devient cathédrale, au centre d’un territoire qui comprenait 44 paroisses et 8 annexes et disparaîtra en 1790. L’abbaye est, à cette époque, à son apogée et le premier évêque fait construire la salle capitulaire (actuelle sacristie) et le chœur de l’église. Un palais est également édifié à la même époque.
De style roman, l’architecture de l’église de Saint Papoul a été remaniée au cours des siècles, avec notamment un cloître construit au XIVème siècle, qui est resté le joyau de l’ensemble. Les quatre galeries forment un polygone irrégulier avec des arcades plein-cintre retombant sur des colonnettes jumelées par des couples de chapiteaux. Les chapiteaux les plus nombreux sont ornés de motifs à feuillage avec aussi de nombreux animaux monstrueux du «gothique fantastique». La petite salle des fonds baptismaux possède de très belles têtes de facture romane. Mais Saint Papoul est également réputée pour les sculptures du «Maître de Cabestany». Ce dernier est l’un des plus grands maîtres des années 1180-1200. Il a travaillé en Italie, en Espagne, à Cabestany et au Boulou. Ses chapiteaux sont très originaux avec des personnages trapus, des yeux ovales, globuleux, ponctués de deux coups de trépan aux coins des paupières qui animent les regards. Le nez est tranchant, le menton peu prononcé, les oreilles larges et décollées, les doigts des mains démesurément allongés; les animaux présentent des caractères similaires, parfois des êtres hybrides, des hommes au masque léonin. On trouve ces traits originaux sur le sarcophage de Saint Saturnin dans l’abbaye de Saint Hilaire (15 km au sud de Carcassonne) ou encore dans l’église de Rieux-Minervois.
À Saint Papoul, les oeuvres du Maître sont à l’extérieur de l’abside et de l’absidiole Nord, avec «Daniel dans la fosse aux lions» et «le châtiment des Babyloniens». A voir également au dessus de la porte primitive, un très beau chrisme (monogramme du Christ), composé des lettres grecques X(khi) et P(rho), entrelacées, premières lettres du mot Christos.
Au XVIème siècle, l’abbaye a été pillée par les huguenots et Saint Papoul connaît alors une longue période de décadence. Après la Révolution et durant tout le XIXème siècle, les bâtiments sont abandonnés ou dispersés et le cloître saccagé. Saint Papoul restaurée présente pourtant encore bien des éléments architecturaux intéressants ; les toits, si originaux, l’absidiole romane Nord, des chapiteaux archaïques à l’intérieur, autant d’éléments qui en font sans conteste, le plus bel ensemble architectural religieux du Lauragais.